Hania Rani @ Salle Pleyel | 11.10.2023 – La déception.

C’était la fin de l’été 2021, et je me promenais tranquillement sur Youtube, à la recherche de nouvelles musiques, quand je suis tombée sur cette vidéo.

Hania Rani.

Tout à coup, je la découvrais, et ce que j’entendais, ce que je voyais, me coupait le souffle.

25 minutes d’Hania Rani, que je buvais comme du petit lait en m’extasiant comme si je venais de découvrir un nouveau Radiohead, féminin, et de nationalité polonaise. C’était jubilatoire, c’était magique, c’était fou !

J’avais envie de pleurer tellement je trouvais ça beau. Ce live, son corps en mouvement qui jonglait entre ses instruments, ce temps suspendu à ses doigts qui couraient sur les touches noires et blanches d’une façon hypnotique, la continuité d’un morceau à un autre, cette émotion qui était montée, pendant les premières minutes Glass…

J’ai continué à regarder ses vidéos de live, au fur et à mesure qu’elles sortaient. Puis j’ai voulu y assister. Manqué l’enregistrement pour ARTE, manqué surtout le concert du cercle aux Invalides en juillet 2022, où je n’ai jamais pu avoir de place. Puis la Cigale.

Et finalement, j’y étais. A la salle Pleyel en plus, parfait écrin pour une musique à la fois classique et parfaitement nouvelle.

J’y étais, et sûrement, nous allions vivre comme un rêve éveillé.

Mais rien ne s’est passé comme prévu. Et ça ne l’a pas fait.

Dès la première partie, un duo islandais, « classique et poétique », a plombé l’ambiance. Sur le papier, le projet du compositeur, chef d’orchestre et producteur islandais Viktor Orri Arnason avec la soprano et artiste visuel Alfheidhur Erla Gudhmundsdottir (laquelle avait rencontré Hania Rani pendant ses études à Berlin), aurait pu nous séduire. Mais sur place, ça a été terrible et nous n’avions qu’une hâte : que ça se termine.

Quel soulagement à la fin de leur set !

Place à Hania Rani qui enfin, allait tout nous faire oublier…

Ou pas.

Quelle tristesse infinie. Car entre elle et nous, ce fut un rendez-vous manqué, une incompréhension totale.

Rare image d’Hania Rani à Pleyel dans la lumière : au seul moment de saluer.

Accompagnée d’un contrebassiste – qui officie également aux machines, celle qui nous avait fascinés par sa grâce et son jeu de piano a disparu de notre vue dès les premières minutes du concert.

Dans une salle Pleyel toute entière plongée dans la pénombre, pas moyen de faire mieux qu’entre-apercevoir le dos de l’artiste penchée sur son clavier, un peu de son piano droit que sauvent la blancheur des marteaux, quasiment rien de son piano à queue, absolument rien de ses mains, évidemment.

Aucunes lumières si ce n’est pour quelques pauvres spots qui font à peine de la figuration ; du jamais vu (si l’on peut dire).

Si au moins la musique nous emportait, mais rien ne se passe de ce côté là non plus. Centré sur un nouvel album qui n’a jamais aussi bien porté son nom (« Ghost »), le set nous ennuie, nous ennuie, et nous ennuie encore. Nous luttons carrément pour ne pas nous endormir ; c’est inédit pour nous.

Impossible de retrouver cette impression d’une artiste « géniale » au travers de ces titres-là. Le virage un peu plus synthétique ne nous séduit pas du tout. L’ensemble nous parait emprunté, réchauffé, monotone, inconsistant. D’autres diraient « minimaliste ». J’essaye d’être totalement honnête avec mon ressenti.

C’est totalement contre-intuitif, alors que sur cet album, les collaborations impliquent des artistes que nous aimons tant d’ordinaire : Ólafur Arnalds ou Patrick Watson.

Dépités, il faut attendre le rappel pour retrouver une forme d’émerveillement avec deux titres, Hawaï Oslo, extrait de son 1er album Esja, paru en 2019, puis Leaving, de l’album Home, sorti en 2020. Et sur ce dernier, reprendre enfin de cette douceur, de cette voix délicate et belle, de cette féérie de la musique d’Hania Rani, celle qui nous avait enchantés, presqu’envoutés.

Quelle déception d’avoir été déçus par Hani Rani.

Je ne m’en remets toujours pas.

Que cela ne vous empêche pas de l’écouter, si vous ne la connaissez pas encore.

Par un sortilège qui ne me surprend qu’à peine, j’ai encore envie de la faire découvrir…

Vous me direz ?

Photos et vidéos (c) Isatagada

3 réflexions sur “Hania Rani @ Salle Pleyel | 11.10.2023 – La déception.

  1. Merci pour cet article qui fait écho à ma propre expérience avec Hania. Comme vous j’ai été envoûtée, le hasard de YouTube me proposant son concert Arte, dont la moitié des vues me sont désormais imputables 🙂 Il me fallait la voir ! Et moi aussi : un premier concert fin 2024 qui m’a laissée déboussolée, mais avec l’envie de comprendre ce que j’avais pu manquer. Je suis retournée la voir il y a 2 jours à la salle Pleyel où elle jouait entièrement Ghosts accompagnée de plusieurs musiciens et cette fois je l’ai suivie et j’ai trouvé ce concert magique ! Avez-vous redonné une chance à Ghosts comme vous y encourageait le dernier commentaire ? Avec cet album, c’est comme si elle se retournait pour nous dire « et la, êtes-vous encore avec moi ? Parvenez vous toujours à me comprendre ? » C’est vrai, Ghosts est hermétique et nécessite de lâcher prise, mais quel bonheur quand on y parvient ! Je la trouve incroyable car elle ne transige pas, elle va là où son chemin musical l’appelle et elle se fout des conventions. La plus punk des pianistes 🙂
    En tout cas, j’ai désormais entrepris l’exploration assidue de tous vos articles, car quand on mentionne Radiohead ET Hania Rani dans un même texte, on est forcément une personne de grande valeur musicale 🙂

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  2. Tu me permets de ne pas être d’accord avec toi, dis ?
    CERTES j’ai découvert Hania un peu après toi.
    CERTES je n’étais pas à la Salle Pleyel.
    MAIS j’ai adoré l’album Ghosts, que je trouve un cran au-dessus de ce qu’elle avait fait avant, tout en étant dans la même lignée. J’en ai parlé ici : https://japprecie.fr/hania-rani-ghosts
    MAIS je l’ai vue en concert, en juin dernier, au Grand PianO festival à Orléans. En plein air et avant la tombée de la nuit, donc en fait de lumière il y avait ce qu’il fallait. Ce qui m’a permis de faire quelques superbes photos d’ailleurs, que tu trouveras sur Facebook. (Le seul petit point de déception fut qu’elle ne se soit point montrée au merchandising après le concert.)
    Je t’invite à redonner une petite chance à Ghosts, si possible en t’affranchissant de ce que tu aimais d’elle avant ça, et surtout de ce concert à Pleyel… peut-être juste simplement plombé par sa première partie et par l’obscurité (?)

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